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Il y a déjà treize ans que l’Opéra au village œuvre pour faire battre le cœur de Pourrières, petite commune de 5000 habitants, coincée entre le Var et les Bouches-du-Rhône, au rythme de la musique. L’édition 2017 a permis au public de l’arrière-pays varois de se délecter de la présence des pianistes Anne Queffélec et Gaspard Dehaene, son fils, pour un concert exceptionnel, donné dans l’intimité du Couvent des Minimes. Un moment suspendu que nous aurions tous voulu prolonger jusqu’au bout de la nuit.
Jean de Gaspary est ce que l’on appelle communément un passionné. Entouré des bénévoles de l’Opéra au Village, il accueille depuis 2005 l’événement dans un écrin de sérénité, au Couvent des Minimes de Pourrières, bâtisse du XVIe siècle qu’il restaure de ses mains depuis près de cinquante ans. Avec sa chapelle et son cloître, le lieu est un véritable havre de paix mais en ce samedi 24 juin 2017, l’endroit est en effervescence pour le piano à queue est installé sur une estrade recouverte de tapis, sous le majestueux marronnier qui trône au centre de l’espace carré, entre ciel et terre.
C’est ici qu’a pris place, un peu après 19h, Gaspard Dehaene. Elancé et élégant, il a su placer le public sous son charme : « Il est séduisant » pouvait-on entendre dans la salle en plein-air, exposée au climat méditerranéen. Inutile de compter sur nous pour démentir cette vérité mais précisons qu’en plus du plaisir des yeux, le jeune homme a offert un régal auditif que le public n’a pas boudé.
Gaspard Dehaene © DR
Gaspard Dehaene joue tout de mémoire et d’entrée de jeu, il a placé la barre très haute. Nullement intimidé, dans l’intimité et l’atmosphère conviviale du lieu, il a tenu à prononcer quelques mots sur chacun des compositeurs inscrits au programme de la soirée qui s’est ouverte sur la Fantaisie chromatique et fugue en ré mineur de Johan Sebastien Bach, alliage de profondeur et de légèreté, semblable à un coup de mistral. Autour de nous, tout s’est suspendu jusqu’à nous faire perdre toute notion du temps. Certains auditeurs ferment les yeux pour mieux absorber et ressentir les intentions et sensations qui émanent de la sublime partition de Bach, tantôt mélancolique, tantôt pleine d’espoir. Sous la fraîcheur du marronnier de la cour du Couvent des Minimes, les cigales font silence, à l’abri du soleil varois tandis que le programme se poursuit avec deux lieder de Schubert, transcrit par Liszt.
Le compositeur a écrit plus de six-cents Lieder mais ceux choisis sont un tourbillon sensationnel, nous offrant une réflexion sur notre passage sur Terre avec Aufenthalt. Les feuilles se reflètent sur les pierres chaudes du cloître et le vent les fait danser en rythme, comme un accompagnement délicat des doigts de Gaspard courant sur le clavier pendant qu’il joue Auf dem Wasser zu singen.
Le pianiste a terminé son programme par une démonstration de sa virtuosité en s’appropriant la Rhapsodie Espagnole de Franz Liszt composée d’un thème plutôt sérieux et d’un autre plus populaire. Le style est presque conquérant et le rythme va crescendo. La partition hybride mélange les genres. La main gauche, seule, prend en charge le thème grave avant de céder la place à une variation d’aigus comme un florilège de notes festives. Les vrilles nous font lâcher prise et le mot qui nous vient à l’esprit à l’instant où la dernière note se meure dans l’air est fa-bu-leux !
Anne Queffélec et Gaspard Dehaene © SBJ
Selon sa mère, Gaspard apporte au concert le plat de résistance, plutôt consistant, et elle, les petits fours. Il est vrai que les deux parties sont contrastées dans leur interprétation mais elles sont aussi nobles l’une que l’autre. Après l’entracte, la pianiste a pris le relai avec un incroyable programme de danses françaises offertes en bouquet musical explosif, retombant en pétales délicieuses dans nos oreilles. Maurice Ravel, Federico Mompou, Claude Debussy, Emmanuel Chabrier, Maurice Ravel, Camille Saint-Saëns et Jules Massenet se sont succédés avec tendresse et fluidité.
Anne Queffélec a même ajouté une pièce d’Eric Satie, en clin d’œil pour Jean de Gaspary, le maître des lieux. Faisant preuve d’une grande agilité, elle a déployé sa farandole de desserts. La 4e chanson et danse de Federico Monpou, proche des Mazurkas de Chopin, a ouvert le bal entre raffinement et rusticité alors que La neige danse de Debussy, pièce de sa maturité, est un regard de l’homme sur son enfance. Peu à peu, le programme a glissé vers la tendresse grâce au Feuillet d’album de Chabrier pour s’achever dans une sorte d’ivresse avec la Valse Folle de Massenet.
L’ensemble est comparable à une touche de crème Chantilly et de confettis sucrés multicolores disposés sur une coupe glacée prise en terrasse au retour des beaux-jours. Des images de paysages à survoler au petit matin et des rêveries sont venues se poser dans notre esprit pendant que les notes tourbillonnaient dans l’air au cœur d’une stimulation émotionnelle exceptionnelle. Après une petite pause, mère et fils se sont retrouvés pour un quatre mains splendide et émouvant : la Fantaisie en fa mineur de Franz Schubert.
Anne Queffélec et Gaspard Dehaene © SBJ
Ultime moment de joie, ce bonheur a été partagé avec générosité par les deux artistes qui ont su créer en nous un bouleversement intime. Bien plus qu’un dialogue musical, ils ont combiné une fusion triomphante et il faut avouer que cela fait du bien. Impossible de se quitter ainsi. C’est pourquoi le duo nous a offert deux « bis » enchanteurs dont une transcription quatre mains de la Pavane de Fauré et un extrait de la Cantate Actus Tragicus de Bach, Gottes Zeit ist die allerbeste Zeit. Revenant au compositeur qui a ouvert le concert, la boucle est bouclée et l’hygiène auditive est respectée. Ce cadeau irréprochable est une preuve d’un partage qui va bien au-delà de la communication. Ce soir-là, nous sommes véritablement entrés en communion avec la musique.
Un tel concert équivaut à ouvrir la meilleure bouteille de champagne de la cave d’un œnologue à la renommée internationale et cela n’aurait pu se faire sans tous ceux qui ont gravité autour de cet événement. L’Opéra au Village, c’est une équipe d’une quarantaine de personnes pour qui le sens de l’hospitalité et de l’accueil est une valeur réelle. La présidente de l’association, Suzy Charrue-Delenne, a permis de confirmer et de matérialiser la rencontre entre Pourrières et les deux artistes de la soirée. Mais il a aussi fallu organiser l’apéritif dînatoire sous les marronniers, moment convivial par excellence, qui a suivi le concert.
Encore tout étourdis par ce programme de piano d’une beauté renversante, les bénévoles ont virevoltés, plateaux à la main, pour nourrir et désaltérer plus de deux cents personnes, enchantés d’avoir partagé ces instants de sérénité, suspendus entre ciel et terre.
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