De l’art du rébus en musique
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Deuxième journée du Ring à Bayreuth. Un Siegfried théâtral et surprenant nous attend, dans un récit dense en références historiques et culturelles.
La deuxième journée de l’anneau du Nibelung, est celle qui voit l’avènement du héros sans peur qui sauvera le monde : Siegfried.
Tout comme les « héros » du communisme (Marx, Lenine, Staline, Mao), dont Castorf a imaginé les visages sculptés dans le mont Rushmore (à la place de ceux des présidents), Siegfried incarne un idéal auquel tout le monde veut croire. Il s’agit d’un homme nouveau, vierge, qui révolutionnera le monde et apportera un avenir meilleur.
Mais dans ce Ring corrompu par le pouvoir, est-ce vraiment possible ?
Si le jeune Siegfried n’a effectivement pas encore connu les vices des hommes et des Dieux, il est tout de même un produit de cette société décadente et malade. Pris en charge par Mime (magnifiquement rendu par Andreas Conrad, qui en accentue le caractère plaintif et pétulant), à la mort de sa mère, il n’a jamais connu de véritable amour, ayant été élevé dans le seul but de servir le nain et récupérer l’Anneau.
Siegfried au Festival de Bayreuth 2017 © Enrico Nawrath
Avec ses airs de truand (bronzage artificiel, collier d’or et et gilet doré ouvert sur la poitrine), notre héros n’est pas un exemple de vertu et d’empathie. Siegfried s’amuse à maltraiter Mime et à le provoquer, et ne se gêne pas pour ramener à la maison un esclave, i.e. la version Castorfienne de l’ours. Nous remarquons d’un côté l’énergie débordante de Stephan Winke, en parfaite adéquation avec la musique, et sa voix large qui remplit agréablement l’espace, de l’autre l’excellent Patric Seibert qui, pendant tout le Ring, donne vie à une panoplie de personnages muets mais hyperactifs et qui, en vrai caméléon, assure également le rôle d’assistant du metteur en scène.
Conçue de manière à contenir quatre décors différents, la scène d’Aleksandar Denic pivote pour nous montrer les déplacements du héros, qui débarque dans la célèbre Alexanderplatz de Berlin.
Cette ville, parfaite pour représenter la tension entre capitalisme et communisme, l’attend dans toute sa décadence : le triste serveur d’un café miteux dresse des tables en plastique, de la bouche du métro sortent des prostituées fatiguées, et assis contre un mur, repose un sans-abri.
Le Wanderer dans Siegfried au Festival de Bayreuth 2017 © Enrico Nawrath
En attendant de rencontrer le dragon Fafner, qu’il doit tuer pour récupérer l’Anneau, Siegfried découvre un autre être dépaysé, comme lui : une femme-oiseau aux grandes ailes dorées de papillon, peut-être trop grandes pour elle.
Telle une fée resplendissante, l’oiseau de la forêt contraste avec l’ambiance lugubre et désespérante de la ville. La voix d’Ana Durlovski s’aventure aisément dans les aigus pendant que ses gestes mesurés donnent vie à un personnage frais et fragile à la fois.
Siegfried danse avec elle, dans un moment suspendu, amorçant la violence à venir. Puis Fafner arrive. C’est l’homme qu’on voit avancer sur scène, il n’a pas de dragon.
Soudainement, on entend un coup de kalashnikov. Fafner tombe par terre. Le public dans la salle bondit. Les endormis (hélas !) se réveillent en sursaut. Siegfried a tué, de sang froid. Il n’a pas brandi son épée et suivi les règles du combat, car Siegfried n’est pas un héros, c’est un criminel.
Ce moment choc, est suivi par la rencontre du Wanderer/Wotan avec son ancienne amante, Erda.
Habillée grossièrement, elle fait son entrée sur scène en descendant lentement un grand escalier, où elle s’allonge languidement. Encore une fois, Nadine Weissmann est une Erda hors pair, et nous délecte par sa ligne vocale précise et stable et sa voix grave puissante et perturbante.
Le Wanderer et Erda dans Siegfried au Festival de Bayreuth 2017 © Enrico Nawrath
Ensuite, elle se lève et rejoint le mafieux qui incarne le maître des Dieux. Les deux s’embrassent, puis prennent place à l’une des tables. Un serveur leur amène des spaghetti et du vin rouge, qu’ils commencent à savourer. Erda n’y trouve aucun goût (a-t’elle perdu ses facultés ?) puis se fâche, jette du vin rouge au visage de Wotan et s’en va. Le couple n’est plus.
Même avec du vin coulant sur ses habits, ce Wotan dédaigneux et imposant est subjuguant, comme on le voit avec sa nouvelle amante (qui, dans une étrange boucle, est une Erda aux cheveux blonds) « à genoux » devant lui.
Le troisième Wotan de cette production est peut être le plus convaincant, non seulement grâce à l’excellente interprétation de Thomas J. Mayer, mais parce que c’est dans Siegfried que le maître des Dieux bascule irrémédiablement du côté obscur.
Ayant perdu tout ce qu’il aimait (les jumeaux, Brünnhilde, l’anneau, …), Wotan se résigne à son destin et dépasse le point de non-retour.
Ce n’est pas un hasard de le voir déguisé en un improbable hybride de Vito Corleone et Alex DeLarge.
Mais revenons à notre brigand préféré : après avoir remporté l’anneau et le Tarnhelm, Siegfried aussi cherche un nouveau trophée. L’oiseau lui conseille donc d’aller réveiller Brünnhilde, qui dort entourée de flammes.
Siegfried et Brünnhilde dans Siegfried au Festival de Bayreuth 2017 © Enrico Nawrath
Le moment poétique de la première rencontre avec la Valkyrie, devenue maintenant mortelle, est vite estompé par une nouvelle scène à Alexander Platz, où les amoureux partagent un repas en plein air, pendant que des crocodiles dévorent la femme-oiseau (ou une jeune vierge, si l’on se base sur la référence au ballet La Légende de la chasteté de Pina Bausch).
Toujours à cheval entre héros et voyou, Siegfried sauve la jeune femme, puis danse avec elle et l’embrasse, sous les yeux sidérés de Brünnhilde, qui le rappelle immédiatement à l’ordre.
Devant ce Siegfried immature et lâche, on dirait que le vrai héros « ce n’est pas un homme ! »
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