Yuja Wang © Rolex Fadil Berisha
Yuja Wang © Rolex Fadil Berisha

Yuja Wang, la grâce en son Etat

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Mardi 7 octobre 2014. Yuja Wang se produit pour la troisième fois de l’année à Pleyel. Ecouter un concert de Yuja, c’est une valeur sûre, la garantie du zéro défaut, le 100% satisfait.
Un niveau de sublime auquel j’étais « habituée », au point où j’avais presque peur cette fois d’être déçue, peur d’une impression de déjà vu.

Elle proposait ce soir un programme nouveau pour mes oreilles. Elle débute la soirée par des lieder de Schubert, transcrits par Liszt, qu’elle nous livre de façon sage sans jamais être lisse. La progression des morceaux dévoile peu à peu un savant mélange de légèreté et de profondeur, flirtant avec la gravité, sans jamais y sombrer. Et le miracle se produit : ses doigts précèdent nos émotions, nous indiquent la voie(x), nous caressent par des attaques subtiles, mais en aucun cas, la virtuosité porte ombrage à l’émotion. C’est ça, la grâce de Yuja : une perfection au-dessus de tout soupçon d’ostentation.

Elle poursuit après l’entracte avec différentes pièces de Scriabine, dont l’ordre, intelligemment pensé,  nous embarque sans difficulté. Nous sommes pris par la main et par l’oreille par un prélude pour la main gauche rond et presque apaisé, qui nous enveloppe pour mieux nous amener, quasi hypnotisés, vers des fantaisies aux lignes plus sombres, à la douleur exaltée. En incarnant l’obscur et le torturé, servis par une technique magistrale, Yuja nous (dé)montre une facette supplémentaire de son immense talent.

Après une invitation au voyage avec les accents orientaux du Islamey de Balakirev , elle ne s’est pas fait pas prier pour offrir 4 (!) rappels aux notes tantôt romantiques tantôt jazzy (avec notamment un  « tea for two » servi sur un plateau d’humour) à une salle comblée, à défaut d’être comble (comment est-ce possible ?)

Yuja, la généreuse, Yuja, la gracieuse. Elle pourrait presque agacer, si elle n’avait pas cette discrète espièglerie qui nous fait fondre dès qu’elle nous laisse l’entrevoir. Yuja Wang met les atouts de sa jeunesse au profit de son art, et elle le fait si bien…

« Prends un bain de musique une à deux fois par semaine pendant quelques années et tu verras que la musique est à l’âme ce que l’eau du bain est au corps. » (Oliver Wendell Holmes). Avec mes chroniques, je souhaite partager les effets bénéfiques de ces bains de jouvence et convaincre de nouvelles oreilles de faire le grand plongeon!

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